Testament: l’analyse sociologique de Denys Arcand

Par Édith Vallières le mardi 3 octobre 2023

En vedette
Rémy Girard, Sophie Lorain, Guylaine Tremblay

Réalisé par 
Denys Arcand

Date de sortie 
5 octobre 2023

 


Entrevue avec le réalisateur, Marie-Mai et Sophie Lorain

Premier cinéaste canadien à remporter l’Oscar du meilleur film en langue étrangère avec Les invasions barbares en 2004, Denys Arcand est notre joyau national. « C’est un historien du passé, du présent et de l’avenir », aux dires de son alter ego Rémy Girard. Avec ses œuvres marquantes, il ose dire tout haut ce que plusieurs pensent tout bas, quitte à faire grincer les dents de certains spectateurs. À 82 ans, il renchérit avec le très attendu long-métrage Testament.
 
Comédie dramatique au ton satirique, Testament suit les aventures de Jean-Michel (Rémy Girard), un archiviste septuagénaire un peu désillusionné qui attend patiemment la mort dans la résidence pour aînés où il vit. Pour tuer l’ennui, il s’entoure d’une jeune femme à l’oreille attentive et bienveillante (Marie-Mai) et de voisins bios-granos-sportifs (Guylaine Tremblay et Denis Bouchard). Mais voilà qu’un jour, Jean-Michel reprend soudainement goût à la vie en s’impliquant à sa façon dans un conflit opposant la directrice de sa résidence (Sophie Lorain) et de jeunes militants à la défense des droits autochtones. Mais où cela va-t-il le conduire? Vers la réconciliation? Vers l’amour? 
 
« Le film parle de gens qui ne se reconnaissent plus dans des situations X, et ce, peu importe leur âge, explique Sophie Lorain, en entrevue. Ils cherchent difficilement leurs repères au sein d’une société où tout semble légèrement décadré. »

Voulant en savoir plus sur la trame narrative et les singularités de Testament, nous avons questionné le cinéaste Denys Arcand et les actrices Marie-Mai et Sophie Lorain. Compte-rendu d’une journée de presse.
 
D’où vient l’inspiration de ce film?
« La matière brute, c’est vraiment la vie autour de moi, raconte Denys Arcand. Chaque fois que je sors en ville, il y a toujours une manifestation : tantôt contre l’invasion russe de l’Ukraine, tantôt pour la lutte contre les changements climatiques, tantôt contre… Même si les protestants ont tous probablement raison, je me demande sans cesse où cela nous mènera collectivement. Je suis trop vieux pour m’engager dans une cause sociale, mais j’aime faire réfléchir et divertir les spectateurs puisque les interrogations sont constantes à notre époque. Ainsi, les propos de Jean-Michel reflètent souvent la vraie tempête qui sévit dans mon esprit. »

Est-ce un long-métrage politiquement correct?
« Denys Arcand a toujours fait des choses extrêmement intelligentes et pertinentes, mentionne Sophie Lorain. Il ose se promener dans des zones pas forcément acceptables [comme la politique provinciale ou l’identité de genre]. C’est assez rare, surtout dans une société comme aujourd’hui où nous cherchons tous à plaire. » 

Même Denys Arcand avoue lui-même avoir écrit « des blagues déplacées » dans son scénario.
 
Les propos font-ils plus réfléchir que rire?
« Collé sur des enjeux de société, le film est tout en équilibre, remarque Marie-Mai. Le pessimisme se ressent, mais il est toujours balancé avec des dialogues remplis de tendresse et d’espoir. La finale, de ce que je peux en dire, fait du bien. Elle permet de boucler la boucle d’une très belle façon. »

Qui est le public cible?
« Le film s’adresse à tout le monde, car il traite d’enjeux multigénérationnels, dit Sophie Lorain. C’est la preuve que tout le monde a sa place et a quelque chose à dire dans l’échelle de la vie. »

« Les enjeux de société, comme la mort et la société, n’ont pas d’âge », ajoute Marie-Mai. 
 
Qui sont les acteurs clés?
« Une fois de plus, Denys Arcand a propulsé de nouveaux talents, mentionne Marie-Mai, qui fait elle-même ses classes au cinéma. Même si certaines personnes dans la distribution n’avaient jamais joué au cinéma avant Testament, ou du moins ne l’avaient jamais vraiment fait en français [comme l’actrice mohawk Alex Rice], elles ont reçu toute la confiance de Denys. »

« Du côté des doyens, les acteurs Robert Lepage et Yves Jacques font un grand numéro de comédie, respectivement dans la peau d’un sous-ministre de la culture et d’un directeur des Beaux-Arts, précise Denys Arcand. Ils sont complètement délirants dans les reproches qu’ils font au personnage joué par Sophie Lorain. »
 
Pourquoi faut-il voir Testament au cinéma?
« Je n’ai pas besoin de convaincre les gens d’aller voir ce film-là, s’exclame Marie-Mai. Testament, c’est évidemment du grand Denys Arcand! Ce réalisateur expérimenté continue de se surpasser au fil des années, ce qui est inspirant à mes yeux. »

« Il faut aussi aller voir Marie-Mai dans son premier rôle au cinéma, renchérit Denys Arcand. Elle est merveilleuse, belle et charmante. Je pense que vous allez retirer quelque chose de l’histoire du film! »

Pour les besoins de l’article, les propos de nos interviewés ont été édités.

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